Qu'est-ce que la fibre efficace, digestible et non digestible?

L’élément le plus compliqué à remplacer dans les fourrages n’est ni la protéine ni l’énergie, mais la fibre. On le remarque entre autres lorsque les précipitations se font plus rares et que les volumes de fourrage disponibles pour nourrir certains troupeaux sont limités. Pour avoir une alimentation efficace, il faut bien comprendre les notions de fibre efficace, digestibles et non digestibles.
 

Les caractéristiques chimiques et physiques de la fibre sont très difficiles à retrouver dans d’autres éléments, puisqu’elle combine des facteurs de digestibilité, d’efficacité et d’encombrement. Avec la quantité restreinte de plusieurs sources disponibles d’énergie, il devient encore plus important de produire de bons fourrages en quantité suffisante pour maintenir la bonne consommation des vaches. C’est une base essentielle à la production de kilos de gras.
 

La fibre digestible

La fraction de fibre digestible (NDFd 30 h) représente la portion potentiellement fermentescible dans le rumen. Plus elle est élevée, plus la valeur énergétique du fourrage sera élevée et, généralement, plus la capacité de consommation des vaches sera grande. La fermentation ruminale de la NDFd produit des acides gras volatils dans le rumen, lesquels sont dominés par l’acide acétique, précurseur nécessaire pour la synthèse des acides gras de novo, qui représentent une fraction importante du gras du lait.

Le contexte actuel met beaucoup l’accent sur un apport adéquat de fibre digestible afin d’assurer une bonne production de gras. Par contre, pour une même valeur de NDF, la digestibilité de la fibre peut varier beaucoup d’un fourrage à l’autre et expliquer que pour une même teneur en NDF fourragère, deux rations ne produisent pas le même lait ni le même gras.

Un facteur déterminant : le stade de maturité à la récolte. Une portion de cette NDFd fourragère peut être compensée par l’incorporation de NDFd en provenance de divers sous-produits ou encore de mélanges formulés pour garantir un apport de fibre digestible constant. Ces mélanges de sous-produits fibreux peuvent être une solution économique.

Pour les vaches plus avancées en lactation, une augmentation de la proportion de NDFd dans la ration permet de canaliser l’énergie consommée vers la production de lait plutôt que vers un gain de poids, comme a tendance à le faire l’amidon des grains. Amidon ou fibre digestible? Pour ces vaches, le choix devient une question de condition de chair visée.
 

La NDF non digestible

À l’opposé de la fibre digestible, on trouve la NDF non digestible (uNDF 240 h), soit la fibre qui ne sera jamais fermentée dans le rumen, même si elle y restait 240 h. Plus cette valeur augmente, moins le fourrage est énergétique. Il encombre alors le rumen et limite la consommation, surtout en tout début de lactation.

Les premiers résultats de recherche du Miner Institute indiquent qu’une vache haute productrice recevant une ration à base d’ensilage de maïs et d’ensilage de graminées peut ingérer jusqu’à 0,45 % de son poids vif en fibre uNDF 240 h – donc, environ 2,9 kg par jour pour une vache de 650 kg. Si on a un ensilage de graminées à 57 % de NDF et à 16 % de uNDF, alors une vache pourrait en consommer 18 kg (sur une base matière sèche). Par contre, si la uNDF est de 22 % (fourrage moins digestible), alors la vache ne pourra, en théorie, en ingérer que 13 kg.
 

La fibre efficace

Cette relation entre la uNDF 240 h, la consommation et la production de lait est plus précise quand on y combine la longueur de coupe, c’est-à-dire la notion de fibre efficace.

Lorsque les fourrages sont beaucoup moins digestibles, on peut les hacher un peu plus court ou en servir un petit peu moins (voir graphiques 1 et 2). Attention : à ce jour, toutes les recherches ont été effectuées avec des mélanges de foin ou d’ensilage de graminées et d’ensilage de maïs.

Réduire au minimum la uNDF 240 h d’une ration ne devrait pas non plus être un but. Cette fibre non digestible semble être une fibre dite efficace, donc capable de maintenir un bon tapis ruminal et de stimuler une mastication et une fermentation saines. Il en faut un minimum dans les rations. Dans celles à base d’ensilage de graminées et de maïs, cette proportion semble se situer autour de 0,25 % du poids vif des vaches, soit 6 à 8 % de la MS consommée pour des vaches de 650 kg.

C’est cette portion de fibre fourragère qui est extrêmement difficile à remplacer dans les rations lorsqu’on manque de fourrages, paille incluse. Quand on manque de fibre efficace, il faut limiter l’amidon fermentescible, donc la quantité de dérivés acidogènes produits, afin que le pH ruminal reste stable.
 

Le concept ARA de Sollio Agriculture

Des travaux réalisés par le réseau de recherche CRF (Cooperative Research Farms) ont permis de mettre au point le concept ARA de Sollio Agriculture, qui vise à maintenir la fonction de la paroi épithéliale du rumen lorsque les vaches consomment des rations plus riches en grains.

Dans un essai mené en 2013 sur 40 vaches produisant entre 46 et 48 kg de lait en début de lactation, le concept ARA a donné lieu à des augmentations significatives des kilos de gras produits (graphique 3). Depuis, le concept a fait ses preuves sur le terrain également. Bien qu’il n’élimine pas l’importance de bien gérer l’alimentation, le concept ARA favorise une bonne efficacité de production et de synthèse de gras dans les rations riches en concentrés.

Autres points à retenir:

• Viser de bons fourrages;

• Surveiller le tri de ration pour favoriser les kilos de gras;

• Offrir une ration homogène qui doit se consommer de façon homogène;

• Éviter la surpopulation;

• Assurer assez d'espace pour mangeoires et eau;

• Actionner les ventilateurs pour maximiser la consommation et réduire le stress thermique.

Graphique 1 : Relation entre la fibre non digestible physiquement efficace et la production de lait corrigée pour l’énergie
 

Graphique 2 : Relation entre la fibre non digestible physiquement efficace et la consommation volontaire de matière sèche
 

peuNDF 240 = uNDF 240 * peNDF (%NDF) ­> 4 mm (3 plateaux).

Graphique 3 : Impact du concept ARA sur les kilos de gras produits
 

Des lettres différentes au haut des barres indiquent que les résultats sont significativement différents.

Source: Coopérateur. Cet article est initialement paru dans le magazine de mai-juin 2021.